La faune migratrice durement touchée par la criminalité liée aux espèces sauvages

Bonn, le 3 mars 2015- Sur terre, dans notre ciel et à travers les océans du monde entier, les animaux migrateurs sont de plus en plus menacés par la criminalité liée aux espèces sauvages. Des espèces strictement protégées sont illégalement tuées, chassées et commercialisées par des criminels organisés, alimentant les conflits et détruisant les efforts de conservation mis en place pour sauver les espèces dans de nombreuses régions du monde.

Ces espèces sont victimes d’actes criminels qui constituent une grave menace pour la survie de nombreux animaux migrateurs comme les oiseaux, les éléphants, les grands félins, les antilopes, les cétacés, les poissons et les tortues marines.

La criminalité liée aux espèces sauvages se classe aux côtés du trafic de drogue, de la traite des êtres humains et du commerce illégal d’armes, comme l’une des plus grandes activités criminelles internationales. Elle est également l’une des principales causes conduisant certaines espèces au bord de l’extinction, et met de plus en plus en péril les efforts transfrontaliers de conservation

En cette Journée mondiale de la vie sauvage observée aujourd’hui dans le monde entier, la Convention sur la conservation des espèces migratrices appartenant à la faune sauvage (CMS) appelle à une action urgente pour traiter ce problème mondial. « À travers le monde, les animaux migrateurs sont durement touchés par la criminalité liée aux espèces sauvages. Ils sont la cible de criminels, qui les tuent illégalement pour leurs défenses, leurs cornes, leur chair, leur peau ou leur fourrure. Il est temps de renforcer les mesures pour mettre fin à ces infractions aux lois nationales et internationales », a déclaré M. Bradnee Chambers, Secrétaire exécutif de la CMS.

Aujourd’hui, environ 100 éléphants sont tués chaque jour pour leur ivoire et leur chair, et le nombre total d’individus abattus en Afrique chaque année se situe entre 20 000 et 25 000 sur une population estimée à 600 000 individus. La chasse des éléphants, des rhinocéros et des tigres répond principalement à la demande de riches consommateurs du monde entier.

Plus de 40 % des panthères des neiges en Asie centrale ont probablement disparu depuis 1990 en raison de la chasse au trophée pour leur fourrure. De même, suite à la dissolution de l’Union soviétique dans les années 90, le braconnage des antilopes saïga a augmenté en flèche. Les effectifs de cette espèce ont ainsi chuté à seulement 50 000 individus, alors que les niveaux des populations étaient par le passé de l’ordre d’un million d’animaux.

La criminalité liée aux espèces sauvages ne vise pas seulement les animaux emblématiques en Afrique et en Asie, mais aussi l’avifaune migratrice au cœur de l’Europe. Les oiseaux migrateurs sont exposés à des risques accrus parce qu’ils se rassemblent en grand nombre, sur des sites connus et à des moments prévisibles, ce qui en fait des cibles faciles pour l’exploitation par l’homme.

Jacques Trouvilliez, Secrétaire exécutif de l’Accord sur la conservation des oiseaux d’eau migrateurs d’Afrique-Eurasie (AEWA), un traité international conclu sous les auspices de la CMS, a déclaré : « Le commerce de l’ivoire n’est malheureusement que la partie émergée de l’iceberg. L’utilisation non durable de la faune sauvage, comme la surexploitation des oiseaux par certains chasseurs, est tout aussi préjudiciable à la survie des espèces ».

Selon des données non publiées de Birdlife International, il est probable que chaque année des dizaines de millions d’oiseaux soient tués ou piégés illégalement dans les pays méditerranéens.

Durant des centaines d’années, les oiseaux migrateurs ont été piégés dans des filets artisanaux le long de la côte de l’Afrique du Nord, et l’ampleur de ces captures n’a eu que peu ou pas d’impact sur les espèces. Mais aujourd’hui, des centaines de kilomètres de filets en fibre plastique indestructible forment une barrière continue et non sélective, accentuant ainsi la pression sur des populations déjà en déclin en raison de la perte des habitats.

Dans le milieu marin, les tortues marines, qui parcourent les océans depuis plus de 100 millions d’années, sont tuées illégalement pour leur chair et leur carapace utilisée comme objet ornemental. Leurs œufs sont également récoltés pour la consommation. L’exploitation directe de ces espèces - pour leur chair, leurs œufs ou leur carapace - est principalement concentrée dans la région du Triangle de corail, et augmente rapidement.

De nombreuses espèces de petits cétacés ainsi que les dugongs, les lamantins et six des sept espèces de tortues marines, sont considérés comme du «gibier marin», ce qui menace leur survie à long terme.

On estime à plusieurs milliers les dauphins de l’Amazone tués chaque année, principalement pour une utilisation comme appât pour la pêche illégale. L’accumulation des menaces – leur abattage par les pêcheurs qui les considèrent comme des concurrents vis-à-vis du poisson ; la mortalité accidentelle liée aux engins de pêche ; les barrages ; la pollution par les composés organochlorés et les métaux lourds - contribue à augmenter la pression sur cette espèce.

L’utilisation de la dynamite pour la pêche est illégale dans de nombreux pays, mais elle reste néanmoins pratiquée alors qu’elle affecte gravement les mammifères marins, et qu’elle détruit également de larges pans de l’écosystème marin.

La multitude des menaces issues de la criminalité liée aux espèces sauvages est désastreuse pour les animaux migrateurs en danger qui sont déjà confrontés à la perte massive de l’habitat et au changement climatique. Si des mesures urgentes ne sont pas prises, la survie à long terme de nombreuses espèces dépendant de divers habitats au cours de leur migration saisonnière sera menacée.

 

Solutions

La CMS travaille en étroite collaboration avec la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction (CITES) sur un certain nombre d’espèces inscrites aux annexes des deux conventions, qui, actuellement ou potentiellement, sont l’objet de la criminalité liée aux espèces sauvages, notamment les gorilles, la panthère des neiges, l’argali, l’antilope saïga, les tortues marines et le Faucon sacre.

En outre, la Convention travaille avec les gouvernements pour que la faune sauvage puisse traverser les frontières internationales en toute sécurité. Lors de la 11e session de la Conférence des Parties à la CMS en novembre 2014, une résolution sur la prévention des pratiques illégales d’abattage, de prélèvement et de commerce des oiseaux migrateurs a été adoptée.

Un groupe de travail international sera créé pour travailler avec les gouvernements notamment sur les activités illégales. Il conseillera les pays sur la façon de veiller à ce qu’une législation nationale adéquate soit adoptée et appliquée dans le respect des engagements internationaux existants en matière de protection des oiseaux.

Lors de la Conférence, les pays ont également adopté une autre résolution portant sur la lutte contre la criminalité liée aux espèces sauvages au sein et au-delà des frontières appelant à une plus grande coopération entre les pays et les organismes.

« Nous devons profiter de l’occasion de la Journée mondiale de la vie sauvage pour renforcer la sensibilisation mondiale sur la nécessité de conserver et de protéger la faune sauvage de notre planète, y compris le grand phénomène de la migration animale, pour les générations à venir », a déclaré M. Chambers.

Au-delà de la sensibilisation, les solutions doivent associer toutes les parties intéressées afin de préserver la faune migratrice en tant que composante unique de la biodiversité. L’introduction de quotas de capture durable et une meilleure application des lois relatives à la faune sauvage dans les pays de l’aire de répartition des espèces pourraient amener un changement nécessaire qui serait dans l’intérêt des professionnels de la conservation et des consommateurs.

 

Notes aux rédacteurs :

La Convention de Bonn (CMS) a pour objectif de conserver les espèces migratrices terrestres et aquatiques, ainsi que les oiseaux migrateurs, dans toute leur aire de répartition. Il s’agit d’un traité intergouvernemental, conclu sous l’égide du Programme des Nations Unies pour l’environnement, portant sur la conservation de la faune sauvage et des habitats à l’échelle mondiale. À ce jour, 120 États Parties ont ratifié la Convention.

www.cms.int

 

L’Accord sur la conservation des oiseaux d’eau migrateurs d’Afrique-Eurasie (AEWA) est un traité intergouvernemental développé sous les auspices de la CMS et dédié à la conservation des oiseaux d’eau qui migrent le long de la voie de migration d’Afrique-Eurasie. L’Accord couvre 255 espèces d’oiseaux qui dépendent écologiquement des zones humides pendant au moins une partie de leur cycle annuel. Le traité couvre 119 États de l’aire de répartition en Europe, dans une partie de l’Asie et du Canada, au Moyen-Orient et en Afrique. Actuellement, 73 pays et l’Union européenne sont Parties contractantes à l’AEWA.

www.unep-aewa.org

 

Lien utile :

http://www.cms.int/sites/default/files/fact_sheet_wildlife_crime.pdf

 

Contacts

Florian Keil, Coordinateur de l’équipe commune de Gestion de l’information, Communication et Sensibilisation des Secrétariats PNUE/CMS et PNUE/AEWA, tel: +49 (0)228 815 2451), e-mail : [email protected]

Veronika Lenarz, Information du public, Secrétariat PNUE/CMS, tél : +49 (0)228 815 2409 ; e-mail : [email protected]

Last updated on 05 March 2015